Enfants collaborant autour d'une carte au trésor

Développer des programmes CPS pour les enfants et adolescents dans tous les milieux de vie

Des objectifs liés à ces enjeux ont été fixés pour la région : programmes multi-partenariaux de prévention précoce, développement des compétences parentales et renforcement des programmes de type expérientiel en milieu scolaire.

Pilar Arcella-Giraux et Nadège Chanot
Pilar Arcella-Giraux est médecin, référente thématique en promotion et prévention en santé mentale à l'ARS Ile-de-France, Nadège Chanot est référente promotion et prévention en santé en faveur des jeunes (adolescents et jeunes adultes - 12/25 ans) à l’ARS
Développer ou renforcer les CPS des enfants et jeunes adolescents (3-15 ans) : quels sont les enjeux majeurs, notamment en Ile-de-France ?

Dans le cadre de l’élaboration du nouveau Projet régional de santé de l’ARSIF, la définition de dix notions-clés est apparue comme essentielle pour faciliter sa lecture et son appropriation.  Et parmi ces notions clé, l’ARSIF a intégré celle de compétences psychosociales (CPS).

Reconnues aujourd’hui comme un déterminant majeur de la santé et du bien-être, les CPS se situent à la jonction entre le champ de la promotion de la santé, celui de la prévention des problèmes de santé physique et celui de la prévention des problèmes de santé mentale.  Aussi, la Stratégie nationale de santé affirme la nécessité de renforcer, grâce à un effort collectif d’éducation pour la santé, le développement des CPS dès le plus jeune âge et tout au long de la vie.

Sur le sens de l’action à conduire, qui est en Ile-de-France celui de la réduction des inégalités de santé, l’un des principes d’action retenus est celui de la précocité des interventions.  En effet, sachant que la petite enfance et l’enfance sont des périodes cruciales pour tenter de réduire la proportion d’enfants vulnérables et de favoriser le développement global des enfants, des objectifs liés à ces enjeux ont été fixés pour la région : programmes multi-partenariaux de prévention précoce, développement des compétences parentales et renforcement des programmes de type expérientiel en milieu scolaire.

Par ailleurs, à l’heure actuelle, où l’importance des compétences psychosociales commence à être largement reconnue dans le champ de la prévention, de la promotion de la santé et de l’éducation, l’enjeu principal est de pouvoir implanter, à grande échelle, des actions efficaces pour favoriser le développement de ces compétences. Pour ce faire, il y a besoin d’un côté, de renforcer la formation des intervenants sur cette thématique car la mise en place de ces programmes nécessite une formation spécifique et, d’un autre côté, de mieux faire connaitre les actions validées ou inspiratrices susceptibles d’être reproduites sur le territoire.

En Ile-de-France, quelle politique poursuit l’ARS et quelles démarches concrètes ont été mises en place sur ce sujet au niveau régional et local ?

L’ARS Ile de France a développé une réflexion sur le développement des compétences psychosociales depuis plusieurs années.

Tout d’abord, un groupe de travail de partenaires et acteurs territoriaux a été réuni dans le cadre du chantier sur la labellisation des actions de promotion de la santé dès 2013, avec un travail mené en plusieurs étapes : analyse des actions probantes de l’INPES, benchmark portant sur des projets suisses, québécois…, constitution d’un dossier opérationnel présentant des retours d’expériences pouvant être considérées comme inspiratrices, formalisation d’une doctrine portant sur les actions menées en milieu scolaire et périscolaire. Cette réflexion de fond a alimenté le Projet stratégique santé pour les jeunes en 2015, et aujourd’hui le Projet régional de santé 2018/2022 (PRS2).

Ensuite, une étude portant sur 186 interventions menées auprès des 6/12 ans dans les différents départements franciliens a permis d’identifier la manière dont les CPS ont été intégrées dans les projets soutenus par l’ARS, en matière de prévention des conduites à risques entre 2013 et 2015.

L’étude montre qu’associations et collectivités locales se partagent les projets proposés. Les tranches d’âge concernées font apparaitre un déficit d’interventions touchant les enfants par rapport aux adolescents. Et concernant les registres d’intervention, l’étude en montre quatre qui sont le plus souvent retenus par les opérateurs pour développer les compétences psychosociales dans le cadre de ces projets, en lien avec la prévention des conduites à risques : faire s’exprimer les jeunes / mise en situation / appel à la créativité et la dynamique de projet / relation aux autres et médiation par les pairs.

Dans le même temps, l’ARS qui avait introduit l’importance des CPS dans le Guide de l’intervention servant de support à l’appel à projet annuel auprès des promoteurs (publié chaque année), a soutenu pendant toute cette période les associations, les collectivités locales qui ont intégré les compétences psychosociales dans leurs interventions. Sur la base de cahiers des charges dont le contenu s’est précisé (types d’actions, choix de territoires, typologies des jeunes concernés…) au fur et à mesure que la culture CPS s’est développée.

Enfin, dans les inflexions apportées par l’ARS ces dernières années concernant les compétences psychosociales et les projets qu’elle soutient dans le cadre du PRS2 (2018/2012), l’accent est mis sur :

  • Une approche des compétences psychosociales s’inscrivant dans un continuum entre école maternelle, primaire et collège avec une attention particulière portée aux étapes de transitions Il s’agit de mieux prendre en compte les évolutions des jeunes au plan physique, psychique, relationnel dans une vision longue.
  • Le souci de favoriser chez les adultes des pratiques éducatives positives vis-à-vis des enfants et des adolescents : l’empathie, la capacité à répondre de façon adéquate aux besoins fondamentaux des enfants, leur donner confiance en leurs capacités et habiletés en se sentant respectés et reconnus.
  • La nécessité d’inscrire le développement des CPS dans la quotidienneté des enfants.  Il est donc nécessaire de mettre en place des interventions soutenues dans le temps, régulières, et qui prennent en compte le territoire de vie de l’enfant (scolaire et périscolaire, dans le cadre de projets conduits à plusieurs partenaires). Et inscription de ces projets dans le Parcours Citoyen et Educatif et de Santé du jeune, et en complémentarité avec l’Ecole promotrice de santé.
  • L’importance de la place des parents. Il ne s’agit plus seulement de les informer, mais de leur apporter des aides et soutiens concrets à la parentalité, tenant compte de leurs besoins (compréhension de l’évolution du jeune, communication avec le jeune.). L’approche par les déterminants des inégalités sociales et territoriales de santé est dans ce cadre sollicitée pour concevoir et dimensionner cet appui.
Plus particulièrement, comment l’ARS IdF et l’Education nationale (au niveau académique ou local) travaillent-ils en partenariat sur ces questions ?

Le mouvement visant l’intégration des actions de renforcement des compétences psychosociales dans les interventions de prévention est engagé par l’ARS Ile-de-France depuis plusieurs années.

Aussi, des principes sont posés et partagés dans le cadre de la Commission de coordination des politiques publiques (CCPP) [1] dans le domaine de la prévention.  Cette commission, associant les services de l'Etat, les collectivités territoriales et leurs groupements et les organismes de sécurité sociale, a pour mission d'assurer la cohérence et la complémentarité des actions déterminées et conduites par leurs membres dans les champs de la prévention, de la santé scolaire, de la santé au travail et de la protection maternelle et infantile.

ARS et Education Nationale sont par ailleurs signataires d’une convention-cadre, renouvelée tous les trois ans depuis 2010, facilitant la mise en place de programmes territorialisés au niveau des trois Académies : Paris, Créteil et Versailles. Cette convention facilite la coordination autour des actions que les délégations départementales ARS et les Académies priorisent et soutiennent.
Pour la période 2018/2022 du PRS2, ces programmes traduisent notamment une volonté commune de renforcer la promotion de la santé mentale dès l’entrée dans la scolarisation, avec une priorité donnée au jeune enfant et à l’enfant (3/11 ans) selon les recommandations de la nouvelle Stratégie nationale de santé.
Enfin, la place des compétences psychosociales est affirmée, avec une décision de généraliser dans tous les établissements les interventions les renforçant, dans le cadre des mesures cherchant à améliorer les conditions environnementales de la scolarité pour le développement de l'Ecole promotrice de santé.

Enfants collaborant autour d'une carte au trésor

Dossier Compétences psychosociales des enfants et jeunes ados (3-15 ans)

Notes:

  • [1] . L'article L.1432-1 du Code de la santé publique - issu de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) - prévoit qu'auprès de chaque Agence régionale de santé (ARS) soient constituées deux commissions de coordination des politiques publiques de santé, l’une concernant la prévention et l’autre les accompagnements médico-sociaux.